Passage



Dame la Mort fait festin
à larges bouchées
dans la galette des miens.

Elle m'a déjà mangé les vieilles branches
apprécié mes oncles et tantes,
éclairci les rangs maigres de mes anciens.

Voilà qu'elle rode tout près, frôle ma mère
après avoir englouti mon père
la peur du vide me tient.

De la fratrie paternelle ne reste rien
une décennie a suffit pour que je me tourne
et ne trouve plus que souvenirs du passé.

On est jamais préparé à l'absence définitive
douleur et espoir de lumière
se déchirent mon coeur.

Mes os tremblent de chagrin contenu
et cherchent la moindre étincelle de chaleur
comme un vieux chat mouillé
auprès de ceux qui demeurent.

2013

8 commentaires:

  1. Ça fait froid dans le dos ! Ça remue les tripes ! Tes mots me troublent et je m'en délecte ! Je ne peux m'empêcher de lire et relire. Comme l'appel du vide auquel l'on ne peut résister. Ah ! poésie quand tu nous tiens :-)*

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  2. Hello David :)

    C'est peut-être un peu lourd ce que j'écris mais je suis hantée par la mort ces temps-ci. A juste titre parce que ma famille est décimée. Ces personnes qui ont peuplé ma vie tombent comme des arbres abattus par la tempête du Temps.
    Il y a longtemps que je parle à la mort. J'ai failli mourir étranglée toute enfant depuis je garde une sensibilité de la gorge extrême et ne supporte pas l'idée d'être entravée même par jeu (un lointain cousin attardé mental lors d'une "crise" avait coincé mes deux bras sous ses genoux et m'étranglait tout bêtement. Les autres enfants autour pensaient à un jeu et riaient comme des fous pendant qu'il serrait de plus en plus fort. Ce jour-là si mon père n'était pas sorti de la maison et bien je ne serai plus là pour en parler. J'avais sept ans et cette incident reste un traumatisme important. Être épinglée au sol comme un pauvre insecte m'a marqué à vie). Puis j'ai flirté avec elle une fois encore quand elle se nommait "cancer". Je t'avoue que mourir ne me fait pas réellement peur, mais j'ai toujours l'idée de te faire écho sur le sujet alors je n'en dirai pas plus. On a curieusement des préoccupations similaires.

    En tout cas je te remercie de passer si régulièrement et de laisser aller ton ressenti toujours apprécié et réconfortant quand au vide sidéral de cette blogosphère!

    T'embrasse fort, à bientôt chez toi, j'ai aperçu un texte qui une fois encore me parle au sujet du sommeil.

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    1. Bonjour Dé !
      Je voudrais d’abord te dire que je ne trouve pas lourd du tout ce que tu écris. Grave parfois, mais jamais lourd :-) Comme tu le sais, je m’interroge aussi beaucoup à propos de la mort, de cette fin inévitable qui laisse planer le doute et un grand mystère sur ce qu’il adviendra après. Autrement dit, à propos du sens même de la vie que la perspective de cet inexorable point final ne cesse de remettre en question. Cela bien que je n’ai pas vécu d’expériences aussi traumatisantes que les tiennes. Un questionnement dont l’urgence croît assurément avec les années qui passent ;-) C’est un grand plaisir en tout cas d’échanger avec toi sur ces préoccupations que nous partageons :-) Aussi n’y a-t-il aucune nécessité que tu me remercies pour cela : j’y trouve aussi mon compte, égoïstement ;-)
      Quant au vide sidéral de la blogosphère, je l’éprouve tout autant que toi, mais curieusement, il me laisse assez indifférent. À la notoriété, je préfère cent fois de rares mais riches échanges avec des personnes telles que toi, qui ont quelque chose à dire :-)
      T’embrasse fort tout autant et bien-sûr tu es plus que la bienvenue dans mon petit monde nocturne dont tu es assurément l’une des étoiles les plus lumineuses ;-)

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  3. Bonjour Dé !
    Ca faisait un certain temps que je n'étais pas passé chez toi ! Il est vrai que je m'éloigne de plus en plus de la blogosphère ces derniers temps, moins envie, tout simplement. Longtemps que je n'étais pas venue ici, donc, et ce soir c'est un long moment passé à te lire, à me trouver absorbée par tes derniers textes...
    Echos.
    Forcément, nous avons le même âge, nous vivons peu ou prou les mêmes étapes, ceux qui étaient là bien avant nous, si solides, ces rocs sur qui nous nous sommes tant de fois appuyés deviennent si fragiles, pour s'en aller un à un... Et nous qui avançons à leur suite...
    Mais il y a aussi les jeunes pousses toutes tendres qui pointent le bout de leurs nez à l'horizon des neveux et nièces... Je balance régulièrement entre tristesse et émerveillement, quelle drôle histoire que la vie, tout de même :)
    Je t'embrasse, chère Désirée, et m'en vais reprendre ma lecture !

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  4. Bonjour chère Ka la discrète :) Il n'y a pas que toi qui t'éloigne, je reflux avec la vague et la vague est centennale. Je lutte pour ne pas abandonner définitivement la place. Parfois je me demande si je n'ai pas achevé mon grand ménage, si je n'ai pas dit tout ce que j'avais à dire, si je suis capable d'écrire encore.Il me manque l'envie. Il me manque une muse. De toute évidence. Et dans le même temps je ne suis pas certaine d'en vouloir une. Il me faut effectuer une nouvelle mue. A force de m'épurer je vais bien finir par me trouver moi-même ;)

    On s'habitue à voir des personnes autour de nous comme des points de repère silencieux, évidents parce que "naturels". J'avoue que la disparition de ces totems ne m'avait pas réellement effleurée. Avec la mort des mes oncles et tantes c'est quelque part des morceaux de mon enfance qui disparaissent. C'est toujours douloureux...

    Je t'embrasse aussi chère Ka et à bientôt de te lire

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  5. Un jour on connait plus de morts que de vivants et on bascule... Mais si on cherche à aggrandir artificiellement le cercle des vivants pour mépriser la mort, on meurt sans s'en apercevoir. Les vieux rétrécissent en même temps que le cercle mais il y a une sorte de densité dans leur fragilité et comme une force sereine dans leur regard pâle. Puis ils partent et les souvenirs retraversent notre chair...

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  6. Pas plus tard que dimanche on a fait du rangement chez mes parents. Avec ma mère on a regardé de vieilles photos et on a réalisé que sur l'une d'elle il n'y avait plus que des morts, à part elle...ça l'a effrayé je crois.

    Oui je suis d'accord avec toi. Il y a une seule chose que j'aimerai, c'est ne pas passer seule. Je trouve que la chose la plus horrible qui soit pour un être humain c'est d'être seul au moment de sa mort. Seul et perdu.

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  7. Comme la trace des mains négatives,
    où la couleur cerne la présence,
    En creux , le sillon de la mort,
    le vide ,tracé, de l'absence,

    Une chambre des échos,
    où se perdent les pensées,
    celles d'une immobilité
    jamais voulue,

    cartes postales jaunies,
    buée opaque sur la vitre
    où apparaissait ton visage,
    sans même songer aux pourquoi,

    .. mais juste ce froid... :
    C'est une salle d'attente
    aux fenêtres jamais ouvertes.
    Aucun train ne s'arrête pour moi.

    -
    RC – nov 2015

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