Liberté

 




Les heures passent

blanches et bleues

je ne dis rien

je n'appelle pas:

je joue le jeu. 

Mes dés sont pipés je le sais

le choix ce n'est pas moi

qui l'ait

ce sont les dieux, les arcanes

les augures, le hasard

ou peut-être la destinée.

Mes mains sont creuses d'impuissance,

ma tête est pleine de ton soucis.

J'use mon coeur sur des lames

des angoisses que tu juges absurdes

ma chérie. 

Autour de tes poignets

j'ai ôté les pauvres lianes

qu'autrefois j'y avais mis, tu es libre 

d'aller vers le bonheur ou le drame,

j'en accepte le pari.



2023

Au fond

 




Au fond des douleurs et des larmes,

des lacs épais aux eaux noires,

du silence en mon coeur dévasté,

tu n'es pas venu.

Près des montagnes où plus rien ne respirait,

quand mes lèvres étaient bleues

et que l'air m'écrasait, tu n'es pas venu.

Je n'attendais que toi

le monde s'était absenté.

Pourtant tu n'es pas venu.

Pas un mot pas une pensée,

pas un signe.

Alors ne me dis plus que tu m'aimes

je n'y croirai plus.



2023

Racines

 




Depuis que je m'adonne à la généalogie, je me suis souvent désolée que mes ancêtres étaient pour le moins timorés. Lorsqu'on regarde la carte qui les situent jusqu'en 1650 environ, on voit bien qu'ils sont tous du même coin, dans un rayon d'environ 50 kilomètres (en étant généreuse). Un seul "estranger": mon petit François. Déposé dans un tour d'hospice à Lyon en 1837. Sa mère a laissé une lettre dans laquelle elle demandait qu'il soit baptisé, malgré l'abandon elle lui faisait aussi le cadeau d'un nom et d'un prénom. La piste, malgré mes recherches s'arrête là. Qui était-elle? D'où venait-elle? Qui était le père? Mystère. Comment François a t'il  "atterri" dans la Drôme? Simple: il y a été placé chez un couple de fermiers à quatre jours à peine. Et il y est resté. Y a fait souche.

Voilà le plus "exotique" de mes ancêtres. J'ai souvent lu que tous les Français "descendraient" de Charlemagne d'une manière ou d'une autre. Dans mon cas donc, c'est d'une autre...je n'ai dans mon arbre que des paysans, des laboureurs, des manouvriers, parfois des paysans propriétaires de leur bien. Des tisserands. Malheureusement point de nobles, petits ou grands, dont la lignée remonte jusqu'à Mathusalem: une bénédiction pour tout généalogiste amateur car pour des raisons évidentes d'héritage et de lignée ceux-ci tenaient leur arbre à jour.

Jusqu'à cette semaine. Je remontais doucement l'arbre côté époux, par sa mère Normande quand je tombe sur l'inespéré: un noble! Bon, un petit, avec un petit château (Nacqueville). Mais en tirant doucement le fil je découvre non pas Charlemagne mais Rollon. Le premier duc de Normandie. Et ma fille hilare de s'exclamer:" Et bientôt tu vas me dire que mon ancêtre c'était Guillaume le conquérant??" Heu...oui. En ligne directe, par les héritiers mâles jusqu'à la Renaissance où le fil bifurque dans le giron d'une fille: Charlotte de Montmorency. A partir de là adieu veaux, vaches, cochons, titres et grands domaines. Charlotte épouse un petit seigneur de banlieue et les générations suivantes vont perdre grandement en prestige. Je trouve la chose étonnante. Et édifiante. Avoir été d'une famille comptant plusieurs grands maréchaux de France, conseillers des rois de l'époque, et petit à petit n'être plus que des anonymes. Des sans grades. Comme quoi, tout cela, même s'il perdure dans certaines familles, est bien volatil. 

Depuis j'ai appris que ces grandes familles ne divisaient ni les titres ni les domaines entre les enfants, l'aîné mâle héritait de tout, les autres devant se contenter des miettes. C'est ainsi que Charlotte épousa un petit seigneur campagnard avec sa petite dot bien qu'elle fût le premier enfant de ses parents.

Finalement, avec mon enthousiasme et ma fougue habituelle j'en parle à la famille, tout le monde se marre et mon époux se fait appeler: "sa majesté". Il n'y a décidément que moi que ce truc passionne. Ah si: ils sont contents d'être des "vikings". C'est déjà ça ;)